La Source du Dragon

Près du parc

Ne pouvant rien faire en ce qui concerne l’incendie, le petit groupe se remet en route pour le parc du Prater ; Wilhelm arrête ensuite le véhicule à deux cents mètres de la maison repérée sur le plan, afin de ne pas attirer l’attention d’éventuels gardiens. Une fois descendue, Helga accomplit à nouveau son rituel permettant de ne pas laisser de traces dans la neige, et tandis qu’Irena prend soin d’effectuer un examen minutieux des mouvements d’énergie entropique autour du parc, Jan part en éclaireur vers la demeure laissée à l’abandon. Irena n’a hélas pas le temps de le prévenir de ce qu’elle ressent au bout d’à peine quelques minutes : une présence froide, semblant se moquer des trois Mages, ne lui évoquant rien de moins que le mot de “Maëlstrom“. Quelque chose qui demeure tapie près de la grande roue, comme assoupie aux abords d’un noeud de puissance magyque, l’utilisant afin de croître et gagner en force, quelque chose qui ressemble étrangement à un puissant Node entropique sur le point de s’éveiller. Alors qu’elle est sur le point de cesser son rituel de perception magyque pour prévenir ses amis du danger qui les menace, l’Hermétiste découvre alors l’existence d’autres noeuds de puissance mystique à l’intérieur du parc, et formant vaguement un triangle. A ce moment précis, un juron retentit, résonnant bien trop fort à leur goût dans cette nuit hivernale ;  la voix est celle de Jan, qui était justement parti dans la direction de l’une de ces zones suspectes.

Irena prévient sa comparse Verbena que Jan est sans doute en danger, ou le sera très bientôt ; ce dernier ne tarde pas à remarquer une présence non loin de lui, presque invisible, attendant tel un chasseur à l’affût non loin de là, dans la propriété abandonnée. Les deux femmes disent à Wilhelm de les attendre deux cent mètres en arrière et d’éteindre la lanterne du véhicule, puis se saisissent des sacs contenant leur matériel d’infiltration improvisé pour se diriger vers Jan. Alors qu’elle vérifie une fois encore la présence de noeuds entropiques dans les environs, Irena perçoit une silhouette à demi dissimulée derrière une cheminée de la demeure en ruines, une créature dôtée d’une forte corpulence, nantie de larges ailes frémissantes (*) et dont l’existence même semble être une insulte aux lois de la Réalité. Effaçant son cercle focal sur lequel un flocon de neige vient de tomber, marquant la case de Mars… Irena rejoint rapidement la frondaison d’arbres marquant l’entrée de la propriété, s’y dissimulant avec précautions avant d’avertir Jan et Helga au sujet de ce qu’elle a perçu.

Infiltration

Comprenant qu’un affrontement ne serait sans doute pas à leur avantage, les trois jeunes gens attendent quelques instants derrière leur cachette, puis se servent du couvert offert par les broussailles afin de gagner la forêt située derrière le parc. Ils remarquent alors au passage la présence d’un corbeau non loin de là, qui s’envole immédiatement vers Vienne… par le chemin-même qu’ils ont emprunté. Jan, arrivé le premier à l’orée de la forêt, aide ses compagnes à s’y glisser sans se faire remarquer, et depuis l’endroit où il se trouve, l’Akashite voit la créature qui montait la garde dans la maison prendre son envol elle aussi.

Profitant là encore du rideau d’ombre offert par les arbres, les trois compères unissent leurs efforts afin de renforcer magyquement les charges explosives qu’ils avaient préparé un peu plus tôt, sachant qu’il devront les placer dans l’heure pour qu’elles remplissent leur office. Au bout d’un quart d’heure d’une progression pénible, emplie de tension et de nervosité, ils arrivent enfin au mur de briques rouges délimitant l’arrière du Prater ; Jan a tôt fait de constater la présence de traces de pas dans la neige, ce qui prouverait que cette partie du parc est devenue un chemin de ronde…Communiquant avec le lierre qui a envahi une partie du mur, Helga détermine avec peine la présence de sept points où sa structure semble être fragilisée, et ses compagnons décident alors de se servir de ces repères afin de placer leurs explosifs. Après un moment d’intense nervosité provoqué par le passage d’un groupe de gardes visiblement assez détendus, et qui semblaient inspecter l’autre côté du mur, les Mages achèvent leur oeuvre en laissant Irena amplifier une dernière fois le potentiel entropique des charges, dans le but de magnifier leur explosion.  Jan, quant à lui, décide d’aller placer les derniers pains d’explosifs sur une deuxième extrémité du pentacle formé par les murs du parc, à quelques dizaines de mètres de là.

Boum, quand le Prater fait boum…

Lorsque les deux femmes rejoignent l’Akashite quelques minutes plus tard, celui-ci leur montre une lourde porte de métal qu’il a repérée en route : celle-là même qu’il avait vue précédemment lors de sa seconde vision. Il s’agit apparemment d’une porte de service, qui mène à un sentier déblayé depuis peu. Forcés une fois encore de laisser passer deux gardes non loin de la porte, qui semble les dissimuler pour le moment, les Mages ont enfin l’occasion d’essayer les clés trouvées quelque temps auparavant dans le jardin du Palais Melvany : l’une d’elles s’avère en effet correspondre à la serrure.

Jan fait signe à ses amies de se préparer à passer par la porte, et déclenche immédiatement après cela l’explosion des charges. Le résultat est à la hauteur de leurs espérances, et malheureusement plus encore, en tout cas du point de vue d’Irena, qui tombe à genoux, la poitrine transpercée par une étrange douleur à l’endroit même où l’amulette avait laissé sa marque sinistre il n’y a pas si longtemps. Un second mur explose alors à cet instant précis, sans que quiconque sur place puisse expliquer pourquoi ; de plus, le large pan de pierres qui s’effondre alors vient heurter des matériaux visiblement inflammables. Une langue de feu ne tarde pas à jaillir vers le ciel, et en quelques secondes, un incendie se déclare, suivi d’une troisième déflagration, provoquant une véritable panique parmi les gardes. Des cris de terreurs, puis un long hurlement de rage, viennent confirmer ce constat. Helga, tout aussi étonnée que ses compagnons, croit remarquer la présence d’un autre corbeau les observant depuis la forêt, mais ce dernier disparaît tout aussi rapidement qu’il lui était apparu.

Sachant qu’il n’auront pas beaucoup de temps pour profiter de cet effet de surprise, Jan et Helga se précipitent tout de même vers l’intérieur du parc, suivis tant bien que mal par une Irena encore en état de choc. La porte en fer maintenant ouverte donne sur une petite allée enneigée ; le bâtiment le plus proche se trouve bien à 75 m de là, mais fort heureusement, les gardes que voient passer les trois intrus ne semblent prêter aucune attention à leur présence pour le moment. Jan referme la porte à clé, ce qui attire hélas l’attention de la patrouille située à l’extérieur du parc, à présent toute proche. Non loin de là s’élève à nouveau le cri de rage entendu précédemment, poussé par une gorge bestiale, non-humaine, appartenant certainement à l’une ou l’autre de ces grandes créatures ailées aperçues près du parc. L’Akashite condamne cette issue à la hâte avec quelques planches trouvées non loin de là avant de s’éloigner, ne voulant pas laisser ses compagnons seuls plus longtemps face à un tel danger.

Arrivés au bâtiment qu’ils avaient entraperçu un peu plus tôt, nos héros remarquent que les portes de celui-ci sont entrouvertes. A leur gauche, gisant dans une lourde caisse à peine bâchée, on peut voir un tas de pancartes à demi recouvertes de poix, l’une d’entre elles portant la mention “Madame Zora, voyante extra-lucide” (expliquant sans doute la raison de la présence d’une Francesca vêtue en gitane dans la vision de Jan). Helga, quant à elle, se concentrant autant qu’elle le peut dans une atmosphère aussi chaotique, parvient enfin à sentir la présence de sa domestique, qui doit selon elle se trouver sous terre. Tandis qu’Irena, encore quelque peu secouée, monte la garde, ses deux amis décident de déplacer la caisse. Celle-ci dissimulait en fait une trappe menant à un souterrain, et il est fort heureux qu’elle ait été dégagée aussi facilement et que la deuxième clé du trousseau de Lars ait pû l’ouvrir, car l’une des créatures volantes de Fyodor se précipite alors vers les trois Mages en poussant un feulement strident. Ceux-ci ont tout juste le temps de se jeter dans l’ouverture ainsi dégagée et de refermer la trappe sur eux, laissant leur assaillant s’écraser avec fracas contre le mur de la bâtisse.

Dungeon Crawl

Le couloir sur lequel donnait la trappe semble être en fait un escalier, dont les marches presque entièrement invisibles sont faiblement éclairées par des lampes-tempête noires accrochées au mur. Un très léger courant d’air balaye le souterrain, indiquant que celui-ci possède une autre sortie, bien que cela ne soit pas encore la préoccupation première des trois explorateurs… Helga perçoit toujours, et fort heureusement les battements de coeur très diffus de Francesca ; Irena, qui s’efforce quant à elle de préparer mystiquement le groupe à une éventuelle tentative d’embuscade, constate que la zone toute entière s’avère être comme imperméabilisée, rendant l’établissement d’un effet magyque beaucoup plus difficile. Tout ce qu’elle réussit à percevoir sont des silhouettes sans forme dansant presque au-delà de son champ de vision, ainsi que des bribes de conversations incompréhensibles, parmi lesquelles revient toujours le même mot, dans une psalmodie rauque et angoissante : Enneakephalos...

Au bout de 150 marches environ, le long escalier s’interrompt brusquement, révélant un palier ainsi qu’une pièce étroite, d’un aspect plutôt lugubre. Jan fait rapidement signe à ses amies de s’arrêter, car des pas résonnent maintenant dans l’escalier, sans qu’il soit toutefois possible de savoir s’ils viennent d’en haut ou d’en bas. Usant des zones d’ombre créées par les lanternes afin de rester dissimulé, Jan, qui s’est avancé avec prudence, distingue les jambes d’un homme portant de lourdes bottes de marche, fort semblables à celles que portaient les bandits enrôlés par Lars Kriczek. L’homme porte également une bandoulière de cartouches, ainsi qu’un pistolet et deux couteaux à la ceinture ; au bruit de ses pas, Jan comprend qu’il est seul. L’Akashite décide alors de faire diversion en lançant un caillou sur une lanterne située un peu plus loin ; celle-ci tombe, répandant de l’huile enflammée sur le sol. Le garde se précipite vers la lampe afin d’éteindre ce début d’incendie à l’aide de sa veste, et c’est à ce moment que Jan sort sa propre lame de son fourreau et se jette sur lui dans un silence impressionant, l’assommant d’un coup de pommeau bien placé. Toute menace à présent écartée, le mercenaire indique aux deux femmes que la voie est libre, et tous trois reprennent leur descente avec prudence.

Dans l’antre du dragon

L’arche sous laquelle les trois explorateurs passent alors donne sur un autre couloir, un peu plus étroit, où se trouve une porte en acier au-dessus de laquelle est placé un étrange symbole : un serpent ailé, sans doute un dragon, à l’image des blasons généralement utilisés parmi la populace slave en tant que symbole de force et de brutalité, mais aussi d’honneur. Jan entrouvre la porte, qui donne sur un couloir identique au précédent bien que plus étroit, puis sur une autre porte arborant le même blason. A chaque coin du couloir, de lourds tonnellets cerclés de fer ainsi que des sacs de toile liés ensemble par une longue corde noirâtre alourdissent la pièce d’une désagréable odeur de nourriture pourrissante. La lente mélopée entendue un peu plus tôt s’élève à nouveau aux oreilles d’Irena, et lorsqu’elle effleure l’un des tonneaux du bout des doigts certains semblent d’ailleurs dissimuler grossièrement une trappe un étrange et fort déagréable sifflement ne tarde pas à s’insinuer dans son esprit, s’évanouissant après quelques secondes, mais laissant derrière lui une subtile impression de menace.

Jan entrouvre discrètement la porte : le son de voix rocailleuses conversant dans une langue étrangère, probablement d’origine slave se fait alors entendre, accompagné de bruits de verres qui s’entrechoquent, comme lors d’un dîner. Le mercenaire allemand intime alors immédiatement à ses amies de faire retraite. N’ayant d’autre choix que de continuer en passant par la trappe, les trois Mages dégagent cette dernière avec précaution, découvrant littéralement une échelle métallique qui semble descendre jusqu’à un couloir incliné et formant un ‘U’ rudimentaire. Selon Helga, Francesca n’est plus très loin, cela est quasiment certain. Jan quant à lui, et par mesure de prudence, décide de reprendre la tête de la petite expédition.

Une fois le tournant passé, le couloir s’ouvre sur une petite alcôve. Celle-ci abrite des marches descendant vers un autre couloir, ou peut-être une grande salle ; au bas de ce court escalier se trouve une nouvelle porte métallique, qui cette fois ne porte aucun symbole. La ‘salle‘ en question semble faire au moins une centaine de mètres de long, et s’achève par une longue volée de marches menant à une vaste arcade soutenue par neuf piliers, fort semblables à ceux qu’Irena et Helga ont pu voir sur l’esquisse que leur avait montré le Père Knecht. Ceux-ci dissimulent partiellement ce qui pourrait être une autre alcôve, située un peu plus loin, de l’autre côté de la salle. Autour des piliers s’enroulent de longs serpents de marbre, et de cette même direction provient un doux et sinistre clapotis. Selon Jan, cette salle doit se trouver à peu de choses près au centre du pentacle sommaire qu’ils avaient défini un peu plus tôt grâce à leur plan du parc. Sur les murs, de chaque côté de cette pièce aux allures de cathédrale chtonnienne, des symboles gravés à même la pierre, aux formes sinueuses et malsaines, s’étendent sur une dizaine de mètres ; les lampes-tempête accrochées tout autour d’eux ne font rien pour rendre plus agréable la vision de cet endroit cauchemardesque, car la lumière qu’elles projettent est d’un vert intense, presque glacial.

Aucune trace vie ne semble présente en ces lieux, et nulle trace de Francesca n’est repèrable à première vue, bien qu’elle soit maintenant toute proche. Toutefois, lorsque Jan s’approche de la porte fermée, il lui semble entendre des murmures venant de l’autre côté du battant, des mots dont les intonations sont très similaires à celles qu’ils ont entendus au cours de leur exploration souterraine. Selon Helga, c’est de là que proviennent les battements de coeur de sa domestique, sur lesquels elle n’a cessé de se concentrer depuis le début de leur descente…

(*) NDI: Vous aurez bien sûr tous reconnu ici une Gargouille aux ordres des Tremere.